Hervé
Marchal et Jean-Marc Stébé, La France périurbaine,
QSJ ?, PUF, 2018, 128 p. 9 €.
Une mise au point universitaire, de deux sociologues, sur les questions du périurbain français.
Pour ses auteurs*, « le présent ouvrage propose de saisir les "France périurbaines" à partir d'autres approches allant du social au spatial, du morphologique à la comparaison internationale et du politique au psychoaffectif". Leur propos s'organise dans ce but autour de six chapitres : (1) le périurbain appréhendé par les sciences sociales ; (2) le processus d'objectivation du territoire périurbain ; (3) les questionnements et les débats suscités par l'étalement urbain; (4) les formes de la périurbanisation à travers différents contextes nationaux en Europe et aux États-Unis ; (5) les défis auxquels le périurbain doit faire face : vieillissement, ségrégation, désillusion pavillonnaire..., et (6) les controverses majeures portant sur l'actualité et l'avenir des espaces périurbains : relégation, durabilité, tendances électorales...
Un chapitre initial rappelle, depuis plusieurs décennies, le passage de cette question périurbaine de la géographie à la sociologie, et montre comment un glissement de la campagne (le "rural profond") au périurbain s'est peu à peu effectué à travers la question des banlieues, le périurbain restant durablement un angle mort, hors de la dichotomie traditionnelle rural/urbain.
Un constat sur les "jeux de mots" perpétuels dans la définition de cet espace d'entre-deux - successivement : rurbain, périurbain, tiers espace, et même proposition nouvelle d'un "pré-urbain" - alors que le périurbain, au-delà de sa définition statistique par l'INSEE, désormais largement inopérante et contestée, n'arrive toujours pas à s'imposer clairement entre l'urbain et le rural, ce dernier encore assimilé à la campagne, voire à la nature.
Contrairement à l'annonce de l'éditeur, rien sur la "gouvernance participative" censée y progresser, au-delà de la "clubbisation" sociétale, alors que c'est précisément une confiscation accentuée de la démocratie et de la politique par les élus locaux (les seuls maires) dans le cadre des intercommunalités, qui pose aujourd'hui sérieusement problème.
Un bref chapitre sur la périurbanisation dans le monde, alors que la bibliographie est quasi exclusivement franco-française, pour accréditer l'idée d'une "gentrification" en cours des suburbs dans un monde de la métropolisation, plaquant encore et toujours la question du périurbain sur les moyennes banlieues pavillonnaires, une propension dont témoigne également l'image de la page de couverture, si récurrente sur un tel sujet. Alors qu'un ouvrage récent du canadien Roger Keil (Suburban Planet, portant sur l'extension multiforme du domaine de l'urbain, 2018) montre qu'il est possible, tout en les différenciant, d'associer dans un même raisonnement, les différentes formes de l'extension périphérique du domaine (au sens de domination) des métropoles, forme contemporaine de "la révolution urbaine" annoncée par Henri Lefebvre dès 1970 (et unique référence à lui dans la bibliographie).
Mais ce n'est que dans le chapitre final, sous couvert de "controverses et de vifs débats", que se révèle, en fait, un objectif transversal de l'ouvrage : il s'agit de faire front serré (sociologique, géographique et politiste) contre les publications de Christophe Guilluy, qualifié de "consultant géographe", non sans les avoir préalablement réduites à un schéma centre-périphérie stigmatisé d'emblée comme obsolète. Une levée de bouclier académique collective contre les thèses d'un non-membre du cénacle académique, prises de surplomb. Elles sont pourtant plus élaborées que ce qui en est dit ici, pour peu qu'on se donne la peine d'en prendre connaissance telles qu'elles sont. Au moins auront-elles eu ce mérite de formuler des interrogations auxquelles il n'est pas sûr que ce présent livre, lui même dense et synthétique, apporte des réponses plus assurées et définitives, et qui restent donc encore largement ouvertes.
Présentation de l'éditeur
« Les territoires périurbains sont des zones qui se situent "autour" de la ville. Ni tout à fait urbains ni tout à fait ruraux, ils sont le reflet des choix urbanistiques du XXe siècle. On les juge aujourd'hui avec sévérité : ils seraient l'espace du repli sur soi, de l'égoïsme et de l'homogénéité sociale ; ils seraient une dénaturation du monde rural depuis l'arrivée des néoruraux dans des lotissements "sans âme" ; ils seraient également un sous-espace urbain dépourvu de centralité. Pire : ils ne seraient pas écologiques, gaspillant l'espace et multipliant les infrastructures routières tout en dévorant espaces agricoles et naturels.
Pourtant, les études menées depuis une quarantaine d'années permettent de nuancer ces visions caricaturales. Elles rendent justice à un espace diversifié, pluriel et socialement ouvert. C'est même au cœur du périurbain que s'inventent des pratiques parmi les plus innovantes : énergie alternative, agriculture bio et solidaire, gouvernance participative, aménagement, animation culturelle. »
* Les auteurs
- Professeur de sociologie à l’université de Bourgogne (Dijon), Hervé Marchal mène de nombreuses recherches sur les inégalités socio-territoriales, l’étalement urbain et les identités du citadin.
- Professeur de sociologie à l’université de Lorraine (Nancy), Jean-Marc Stébé est spécialiste des quartiers d’habitat social, des fragmentations socio-territoriales, de la périurbanisation et des utopies urbaines.
Sommaire
Pour ses auteurs*, « le présent ouvrage propose de saisir les "France périurbaines" à partir d'autres approches allant du social au spatial, du morphologique à la comparaison internationale et du politique au psychoaffectif". Leur propos s'organise dans ce but autour de six chapitres : (1) le périurbain appréhendé par les sciences sociales ; (2) le processus d'objectivation du territoire périurbain ; (3) les questionnements et les débats suscités par l'étalement urbain; (4) les formes de la périurbanisation à travers différents contextes nationaux en Europe et aux États-Unis ; (5) les défis auxquels le périurbain doit faire face : vieillissement, ségrégation, désillusion pavillonnaire..., et (6) les controverses majeures portant sur l'actualité et l'avenir des espaces périurbains : relégation, durabilité, tendances électorales...
Un chapitre initial rappelle, depuis plusieurs décennies, le passage de cette question périurbaine de la géographie à la sociologie, et montre comment un glissement de la campagne (le "rural profond") au périurbain s'est peu à peu effectué à travers la question des banlieues, le périurbain restant durablement un angle mort, hors de la dichotomie traditionnelle rural/urbain.
Un constat sur les "jeux de mots" perpétuels dans la définition de cet espace d'entre-deux - successivement : rurbain, périurbain, tiers espace, et même proposition nouvelle d'un "pré-urbain" - alors que le périurbain, au-delà de sa définition statistique par l'INSEE, désormais largement inopérante et contestée, n'arrive toujours pas à s'imposer clairement entre l'urbain et le rural, ce dernier encore assimilé à la campagne, voire à la nature.
Contrairement à l'annonce de l'éditeur, rien sur la "gouvernance participative" censée y progresser, au-delà de la "clubbisation" sociétale, alors que c'est précisément une confiscation accentuée de la démocratie et de la politique par les élus locaux (les seuls maires) dans le cadre des intercommunalités, qui pose aujourd'hui sérieusement problème.
Un bref chapitre sur la périurbanisation dans le monde, alors que la bibliographie est quasi exclusivement franco-française, pour accréditer l'idée d'une "gentrification" en cours des suburbs dans un monde de la métropolisation, plaquant encore et toujours la question du périurbain sur les moyennes banlieues pavillonnaires, une propension dont témoigne également l'image de la page de couverture, si récurrente sur un tel sujet. Alors qu'un ouvrage récent du canadien Roger Keil (Suburban Planet, portant sur l'extension multiforme du domaine de l'urbain, 2018) montre qu'il est possible, tout en les différenciant, d'associer dans un même raisonnement, les différentes formes de l'extension périphérique du domaine (au sens de domination) des métropoles, forme contemporaine de "la révolution urbaine" annoncée par Henri Lefebvre dès 1970 (et unique référence à lui dans la bibliographie).
Mais ce n'est que dans le chapitre final, sous couvert de "controverses et de vifs débats", que se révèle, en fait, un objectif transversal de l'ouvrage : il s'agit de faire front serré (sociologique, géographique et politiste) contre les publications de Christophe Guilluy, qualifié de "consultant géographe", non sans les avoir préalablement réduites à un schéma centre-périphérie stigmatisé d'emblée comme obsolète. Une levée de bouclier académique collective contre les thèses d'un non-membre du cénacle académique, prises de surplomb. Elles sont pourtant plus élaborées que ce qui en est dit ici, pour peu qu'on se donne la peine d'en prendre connaissance telles qu'elles sont. Au moins auront-elles eu ce mérite de formuler des interrogations auxquelles il n'est pas sûr que ce présent livre, lui même dense et synthétique, apporte des réponses plus assurées et définitives, et qui restent donc encore largement ouvertes.
Présentation de l'éditeur
« Les territoires périurbains sont des zones qui se situent "autour" de la ville. Ni tout à fait urbains ni tout à fait ruraux, ils sont le reflet des choix urbanistiques du XXe siècle. On les juge aujourd'hui avec sévérité : ils seraient l'espace du repli sur soi, de l'égoïsme et de l'homogénéité sociale ; ils seraient une dénaturation du monde rural depuis l'arrivée des néoruraux dans des lotissements "sans âme" ; ils seraient également un sous-espace urbain dépourvu de centralité. Pire : ils ne seraient pas écologiques, gaspillant l'espace et multipliant les infrastructures routières tout en dévorant espaces agricoles et naturels.
Pourtant, les études menées depuis une quarantaine d'années permettent de nuancer ces visions caricaturales. Elles rendent justice à un espace diversifié, pluriel et socialement ouvert. C'est même au cœur du périurbain que s'inventent des pratiques parmi les plus innovantes : énergie alternative, agriculture bio et solidaire, gouvernance participative, aménagement, animation culturelle. »
* Les auteurs
- Professeur de sociologie à l’université de Bourgogne (Dijon), Hervé Marchal mène de nombreuses recherches sur les inégalités socio-territoriales, l’étalement urbain et les identités du citadin.
- Professeur de sociologie à l’université de Lorraine (Nancy), Jean-Marc Stébé est spécialiste des quartiers d’habitat social, des fragmentations socio-territoriales, de la périurbanisation et des utopies urbaines.
Sommaire
Introduction
CHAPITRE PREMIER - De la géographie à la sociologie
I. De la campagne au périurbain en passant par la banlieue
II. Un phénomène très tôt analysé
III. Un territoire longtemps ignoré par les sociologues
CHAPITRE II - Rurbain, périurbain, tiers-espace et pré-urbain : une question de mots
I. Naissance d’une catégorie statistique
II. L’émergence d’un concept et d’un mot
III. Un territoire émergent : le pré-urbain
CHAPITRE III - La ville étalée
I. La ville sort de ses limites et s’étale
II. Des villes encerclées de pavillons
III. L’automobile, un puissant moteur de l’étalement urbain
IV. La ville étalée face aux injonctions du développement durable
CHAPITRE IV - Un monde en voie de métropolisation
I. La périurbanisation en Europe
II. La périurbanisation aux États-Unis
CHAPITRE V - Club fermé, commune gentrifiée ou territoire désenchanté ?
I. Le périurbain et la question du vieillissement
II. La clubbisation du périurbain
III. Une gentrification périurbaine ?
IV. Un désenchantement des habitants du périurbain éloigné
CHAPITRE VI - Un territoire au centre de controverses et de vifs débats
I. Interroger les dynamiques électorales en zone périurbaine
II. Penser au pluriel le périurbain
III. La relégation de la France périurbaine ?
IV. Comment penser l’aménagement des villes à l’heure de la mondialisation ?
Bibliographie
Table des sigles
CHAPITRE PREMIER - De la géographie à la sociologie
I. De la campagne au périurbain en passant par la banlieue
II. Un phénomène très tôt analysé
III. Un territoire longtemps ignoré par les sociologues
CHAPITRE II - Rurbain, périurbain, tiers-espace et pré-urbain : une question de mots
I. Naissance d’une catégorie statistique
II. L’émergence d’un concept et d’un mot
III. Un territoire émergent : le pré-urbain
CHAPITRE III - La ville étalée
I. La ville sort de ses limites et s’étale
II. Des villes encerclées de pavillons
III. L’automobile, un puissant moteur de l’étalement urbain
IV. La ville étalée face aux injonctions du développement durable
CHAPITRE IV - Un monde en voie de métropolisation
I. La périurbanisation en Europe
II. La périurbanisation aux États-Unis
CHAPITRE V - Club fermé, commune gentrifiée ou territoire désenchanté ?
I. Le périurbain et la question du vieillissement
II. La clubbisation du périurbain
III. Une gentrification périurbaine ?
IV. Un désenchantement des habitants du périurbain éloigné
CHAPITRE VI - Un territoire au centre de controverses et de vifs débats
I. Interroger les dynamiques électorales en zone périurbaine
II. Penser au pluriel le périurbain
III. La relégation de la France périurbaine ?
IV. Comment penser l’aménagement des villes à l’heure de la mondialisation ?
Bibliographie
Table des sigles
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