Très bonne soirée d’histoire citoyenne, hier, au Ciné Nova
de Savenay, sur les "Fusillés pour l’exemple" de la guerre
1914-1918 et l’actualité de leur réhabilitation : pourquoi et comment ?
Cette soirée était organisée par la municipalité de
Savenay - dans le prolongement de son vœu unanime pour la réhabilitation - et
par plusieurs associations d’histoire locale (Amis de l’Histoire, AHLS) et l'UNC. Elle
était co-animée par l’historien Yannick Le Marec, de l’université de Nantes, et
Roger Lepeix du collectif nazairien pour la réhabilitation des fusillés.
Le film de Stanley Kubrick "Les sentiers de la
gloire", dont la projection ouvrait la soirée, n’a rien perdu de sa force
évocatrice (photo). Occasion de souligner que ce film réalisé en 1957, n’a pas été
diffusé en France, dans un contexte de guerre d’Algérie et d’une France
gaulliste et pompidolienne, avant 1975. Dans le débat d’autres films et vidéos
TV ont été cités : Les hommes contre (F.Rosi,1970), Capitaine Conan
(B.Tavernier, 1996), et d'autres encore (mais pas le Pour l'exemple de J.Losey, 1964).
Tourné délibérément en noir et blanc par son réalisateur -dont c’était l’un des premiers longs métrages avant la carrière qu’on lui
connait - sa projection en VO sous-titrée, assumait pleinement ses
caractéristiques de film hollywoodien, bien qu’il ait été principalement tourné
en Autriche. Son scénario synthétique rassemble divers épisodes historiques
réels, dont il s’est librement inspiré, tel celui des caporaux de Souain et du "général fusilleur" Reveilhac. Présenté
préalablement par Y. Le Marec, il a confirmé dans la suite du débat combien il
pouvait, malgré tout, en être un point d’appui solide. Il montre avec force les
terribles réalités de la guerre des tranchées, dite aussi "de
position", et l’impossibilité coûteuse en vies humaines, de vaines
offensives pour une percée des lignes ennemies afin de revenir à une guerre "de
mouvement", ce qui ne s’est jamais véritablement produit.
Un contexte incontournable pour comprendre les refus de sortir des tranchées pour attaquer les positions adverses. Il stigmatise également certains comportements de la caste des officiers supérieurs, quand aux premiers temps de l’Union Sacrée, le pouvoir politique démissionnaire leur laisse les mains libres. Ainsi que les errements d’une justice militaire pour le moins expéditive et peu scrupuleuse sur les moyens utilisés par les cours martiales d’exception. Dans le débat la question de ce que pourrait faire aujourd’hui "la grande muette" pour un autre versant de la réhabilitation de ses fusillés a été posée, R. Lepeix indiquant qu’elle reste divisée sur le sujet.
Un contexte incontournable pour comprendre les refus de sortir des tranchées pour attaquer les positions adverses. Il stigmatise également certains comportements de la caste des officiers supérieurs, quand aux premiers temps de l’Union Sacrée, le pouvoir politique démissionnaire leur laisse les mains libres. Ainsi que les errements d’une justice militaire pour le moins expéditive et peu scrupuleuse sur les moyens utilisés par les cours martiales d’exception. Dans le débat la question de ce que pourrait faire aujourd’hui "la grande muette" pour un autre versant de la réhabilitation de ses fusillés a été posée, R. Lepeix indiquant qu’elle reste divisée sur le sujet.
Quant à l’histoire de la
réhabilitation elle-même, diverses étapes ont été évoquées, et le rôle de
Ferdinand Buisson rappelé. Des comparaison internationales ont également été faites, qui montrent que le cas français est exceptionnel. Au Royaume-Uni la prise en compte
précoce du "Shell Shock" (ou "obusite") a permis de limiter les
accusations de refus du combat.
Bien que quelques positions tranchées (...c’est le cas de le
dire) aient été parfois exprimées (Jean Jaurès, comme "premier fusillé pour
l’exemple" !), au final cette soirée sans excès ni dérapage polémiques
inutiles, a heureusement donné à voir ce que pourrait être une authentique
histoire citoyenne à la base : sans confusion entre histoire et mémoire,
la première n’ayant pas à être prise en otage par la seconde. Et qui ne
s’arrête et ne s’en tient pas à l’anecdotique, à l’énumération même très érudite des faits bruts,
mais envisage sereinement les questionnements, les problématiques, et les mises
à jour permanentes de l’historiographie la plus récente.
En refusant donc toute instrumentalisation ou manipulation de l’histoire, locale ou plus large, à des fins personnelles ou partisanes, pour en faire réellement, en tant que science sociale critique, un véritable support de réflexion et d'action pour l'émancipation citoyenne.
En refusant donc toute instrumentalisation ou manipulation de l’histoire, locale ou plus large, à des fins personnelles ou partisanes, pour en faire réellement, en tant que science sociale critique, un véritable support de réflexion et d'action pour l'émancipation citoyenne.
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