"Redevance incitative" en Loire et Sillon


Lu dans Les Nouvelles de Loire Atlantique du 31 octobre 2013

En Loire Atlantique des collectivités ont adopté la redevance incitative (RI) pour les ordures ménagères. Si le Grenelle 1 en a fixé le principe, ses modalités suscitent des interrogations. Trois questions à J-Yves Martin, adjoint au maire de la Chapelle-Launay, conseiller communautaire de Loire et Sillon.

- Qu’est-ce que la "redevance incitative" ?

Elle vise à appliquer à l’usager le principe "pollueur payeur", en intégrant le volume des déchets qu’il produit dans sa facture. On abandonne alors la TEOM (taxe d’enlèvement des ordures ménagères), établie sur la valeur locative des habitations, même si payée avec la taxe foncière. Certes la Loi de 2009 de Grenelle 1 précise que « la redevance d’enlèvement des ordures ménagères (REOM) et la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) devront intégrer, dans un délai de cinq ans, une part variable incitative», mais n’exige pas le passage accéléré et intégral à la RI. Ayant fait ce choix, la commission communautaire et le vice président de Loire et Sillon sont restés sourds aux réticences qui se sont exprimées dès les réunions publiques initiales. Ils reculent l’envoi des "factures à blanc" promises.

Carte des collectivités en redevance incitative (Source ADEME)

- Que s’est-il passé en Loire et Sillon ?

On y a fait preuve d’un zèle précipité – dans un large consensus rose-bleu-Verts – ajoutant à l’abonnement au service (120 à 150 €/an selon le bac, entre 80 et 360 l.), la facturation "à la levée" (de 1,66 à 2,29 € chaque) - censée limiter les présentations du bac au passage de la benne ; les entrées en déchetteries (4 €,  au-delà des 12 prévues)  ; et les "sacs prépayés" (9 € les dix !) déposés hors d’une poubelle trop petite. Le vote du 9 octobre contre le barème de 2014 est de défiance. Les habitants ont, eux, le sentiment d’avoir déjà fait beaucoup pour trier et réduire leurs déchets, chiffres à l’appui. Avec la RI, ils craignent, à raison, d’avoir à payer plus pour un service moindre. Car elle rend illusoire tout espoir de diminution.

Source : Presse Océan
- L’idée même de "redevance incitative" ne pose-t-elle pas problème ?

Passer à la RI intégrale revient à faire porter une part plus importante du coût sur les particuliers, supprimant les exonérations des foyers les plus modestes. C’est aussi une question sociale. On perd de vue toute idée de service public financé par l’impôt. Elle complexifie la collecte et augmente les coûts réels de gestion et d’investissements. Une aubaine pour le "capitalisme vert" à l’affût.
Les retours d’expériences ne plaident ni pour la pertinence, ni pour l’efficacité de la RI. La réduction des déchets peut être poursuivie par d’autres moyens plus simples et moins coûteux, visant leur réduction à la source. D’ailleurs certaines collectivités, échaudées par des "révoltes des poubelles" partout en France, font machine arrière et reviennent à une TEOM aménagée. Sous couvert du principe "pollueur-payeur" la RI est dans une logique de coercition plus que d’incitation, à travers l’individualisation et la marchandisation. Elle écarte la valeur d’usage social, au profit de la valeur d’échange néolibérale.

L'article de NLA n°965 du 31 octobre 2013, page 7

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