Logistique métropolitaine et "triangle de Savenay" : de l'opacité dans l'Ecocité

Le 21 février, le Pôle métropolitain de Nantes Saint-Nazaire organisait, à la cité des Congrès de Nantes, un séminaire de travail sur la réalisation d’un schéma logistique de la métropole. Étaient invités, « afin de construire les grandes lignes du schéma logistique métropolitain à perspective de 2040 », l’ensemble des partenaires de l’étude (Métropole, intercommunlités) et les acteurs et professionnels du transport (Géodis, Airbus, Port autonome, syndicat mixte de l'aéroport grand Ouest, RFF... etc). Beaucoup d’appelés donc, mais finalement ... peu d’élus. Sauf de Loire et Sillon, pourtant "angle mort" de la métropole bipolaire.
Dans sa présentation Philippe Huong, universitaire, président du bureau d’études SAMARCANDE, s'est d'emblée appuyé sur une analogie physiologique élémentaire  (la logistique comme "appareil digestif" de la métropole !), alors qu'il est coauteur d’un modèle global plus sophistiqué *. Son approche se veut "transversale et systémique" afin de définir un "hinterland élargi" pour le port autonome, avec "concentration et densification de la plateformisation".


5 scénarios de portée générale ont alors été évoqués :
- « Mondialisation asymétrique », correspondant à la « prolongation du modèle pré-crise ».
- « Fil de l’eau », correspondant à l’hypothèse « poursuite des tendances actuelles ».
- « Nouvelles glorieuses », correspondant à l’hypothèse « croissance, écologie et intervention publique ».
- « Développement durable », correspondant à l’hypothèse « Grenelle généralisé ».
- « Décroissance », correspondant à l’hypothèse « décroissance choisie ».



- Le scénario « mondialisation asymétrique » s’avère être peu acceptable, en particulier selon les critères guidant les politiques publiques de ces dernières années (le développement durable) et ne semble même pas durable y compris à court terme, car il reste très gourmand en ressources.
- Le scénario « fil de l’eau » est un scénario mou et sans aspérité, relativement opportuniste et qui ne résout aucun des grands problèmes qui sont posés au transport et à la logistique, en particulier dans une perspective de développement durable.
- Le scénario « nouvelles glorieuses » est un scénario néo-keynésien fondé sur la relance économique et sur les nouvelles opportunités du développement durable. Il dépend d’un environnement macro-économique, qu’il peut d’ailleurs contribuer à modifier. La question de son réalisme et de sa dépendance d’une forte capacité financière des pouvoirs publics est posée.
- Le scénario « développement durable » correspond aux ambitions de la politique du Grenelle de l’environnement poussée jusqu’au bout de sa logique. Mais comme le montre cette dernière, si on possède la recette, il n’est pas sûr que l’on sache le mettre en pratique et qu’on sache dépasser les contradictions qu’il implique.
- Le scénario « décroissance » est inacceptable volontairement pour une grande majorité de la population, car il implique une révolution des modes de vie ; il parait difficilement applicable sans un choc civilisationnel qui pourrait survenir par exemple après un bouleversement économique ou géo-politique, dans le cadre d’une "stratégie du choc".
 
Trois pistes de questionnement

La discussion s’est ensuite engagée dans trois ateliers :
-         L’excellence logistique au service de l’économie et des entreprises de l’estuaire de la Loire ;
-         Pour un aménagement durable et structuré de la logistique ;
-         Une connexion au monde et aux autres territoires européens.

Il en ressort qu’à ce stade de la réflexion, dans le cadre de la bipolarité métropolitaine à l’interface continentale/maritime, la connexion est d’abord recherchée entre le port et le fer, dans une problématique de construction d’un corridor eco-fret Paris – Espagne. Le Port autonome affirme, quant à lui, son objectif de "massification" à un niveau de 600.000 containers / an.
Dans cette perspective, cinq sites logistiques devraient être privilégiés à moyen terme, dont celui de Nantes Blottereau, pour leur multimodalité et leur positionnement.
Ce n’est pas le cas, pour l’instant du projet (n°18) encore très vague de "triangle de Savenay", d’ores et déjà associé à la "virgule ferroviaire" de Savenay, au Pôle d’échanges multimodal, en relation, d’une part, avec l’aéroport du Grand Ouest et un nouveau franchissement sur la Loire, d’autre part.
Quant à la ZID (zone d’intérêt départemental) - devenue Ecospace - elle viendrait par ailleurs - mais à plus long terme - s'intégrer à la zone rétro-portuaire, d’un Port autonome en quête d’espace, notamment pour l’entrepôt des éléments du futur parc éolien de Saint-Nazaire.
Autant de raisons pour tout faire afin que le "triangle de Savenay" ne demeure pas plus longtemps le triangle des Bermudes d'une "gouvernance" métropolitaine qui cultive - à dessein ? - l'opacité dans l'Ecocité.

*Voir, notamment, l’étude de Samarcande/Predit : « Cinq scénarios pour le fret et lalogistique en 2040 ».  

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