"Nu parmi les fous", un roman de Michel Prodeau


Cette aventure romanesque s’inscrit au cœur d’événements historiques qui ont marqué la Lozère au cours de la seconde guerre mondiale. L’ouvrage inclut une riche documentation sur la Résistance en basse Auvergne, Paul Eluard à Saint-Alban, l’historique du château de Saint-Alban et de l’asile, la création de l’Art brut, la naissance et l’évolution de la psychothérapie institutionnelle.
Sensibilisé par tous ces sujets et soucieux de contribuer au devoir de mémoire, bien que n’étant ni historien ni psychiatre, l’auteur reste fidèle à la forme romanesque. Dans son récit se mêlent alors intimement faits et personnages réels et "héros" fictifs. Puisant dans un fond de réalité, son livre est donc d’abord une fiction à suspense qui se déroule sur  la courte période de mai à juin 1944 : un jeune homme gravement blessé, Nantais d’origine, est amené à l’hôpital de Saint-Alban. Ne possédant aucun signe distinctif susceptible de l’identifier, on ne peut savoir qui il est, d’où il vient, et dans quelles circonstances il a été blessé. Résistant ? Milicien ? Si l’urgence est de le soigner, la vigilance demeure, d’autant qu’à son réveil il est plongé dans une amnésie profonde et durable. Le contact avec un second personnage, républicain espagnol et ancien mineur asturien, engagé au maquis et également gravement blessé, va partiellement l’aider à reconstruire sa personnalité au fil de maintes péripéties qui leur feront découvrir le monde si particulier de la folie.
Alors que sous le gouvernement de Vichy, et avec sa complicité, 40.000 malades mentaux mourraient de faim, de froid et de manque de soins dans la plupart des asiles d’aliénés français, un des rares à résister fut celui de Saint-Alban-sur-Limagnole en Lozère. Ses 500 pensionnaires furent sauvés, grâce à la détermination d’une équipe de médecins-psychiatres, aliénistes d’avant-garde et résistants, notamment les docteurs Lucien Bonnafé, actif militant antifasciste et Francesco Tosquellas, libertaire espagnol condamné à mort par la justice de Franco.
Sous l’impulsion de ces médecins patriotes et avec la complicité du personnel laïque et religieux (les sœurs de la communauté de Saint-Régis), cet hôpital allait également devenir un actif foyer de la Résistance. Des dizaines de maquisards blessés y furent soignés clandestinement en permanence, les mêlant aux "fous", tandis que de nombreux intellectuels pourchassés par les nazis trouvaient refuge en ces lieux : Paul Eluard et sa compagne Nush, Raymond Queneau, Jean Marcenac, Tristan Tzara, Georges Sadoul, Denise Glaser, Georges Canguilhelm et bien d’autres, tous issus du Surréalisme, mouvement que fréquentait Lucien Bonnafé avant-guerre.
Mais le plus important est bien l’œuvre d’humanisation des asiles d’aliénés impulsé avec audace par ces médecins-psychiatres, mouvement qui, après la guerre, prendra le nom de Psychothérapie institutionnelle. Une démarche qui affirme la volonté déterminée de révolutionner l’aliénisme, considérant les malades mentaux comme des êtres humains à part entière, même s’ils vivent en apparence dans un "autre monde".

Selon son auteur, « ce livre n’a d’autre ambition, sous une forme accessible et plaisante s’efforçant d’être rigoureuse, que de contribuer au rappel nécessaire d’une époque qu’on se doit de ne pas oublier, et de rendre hommage à des hommes et des femmes qui, dans des circonstances difficiles voire dramatiques, n’ont jamais douté de la fraternité, de la solidarité, de l’espérance, de leur foi en l’être humain ». D’où ce roman qui certes puise et s’inscrit dans le riche contexte de son époque historique dramatique, mais nous parle également d’aujourd’hui.

Michel Prodeau, "Nu parmi les fous", 2012, 380 p., prix en souscription : 18 € port compris  (ensuite prix public 18 € plus port 4 €), à commander chez l’auteur : le bourg, 48150 LE ROZIER. Mail : prodeau.michel@wanadoo.fr.  

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