Un « Dictionnaire du communisme »


DIX ANS APRÈS LE "LIVRE NOIR..." 
SOUS LA DIRECTION DE STÉPHANE COURTOIS

Dix ans après son « Livre noir du communisme » (R.Laffont, 850 p., 1997), Stéphane Courtois remet ça avec ce « Dictionnaire du communisme » publié chez Larousse.
Prévoyant une nouvelle polémique, l’éditeur a pris lui-même la précaution - y compris dès la campagne promotionnelle du livre - d’indiquer : "Dix ans après le Livre noir du communisme, un nouvel ouvrage qui fera débat. La rigueur d’un dictionnaire relevée par le point de vue d’un historien engagé"
L’ouvrage se compose de trois parties.
-  La première est une assez brève introduction de S.Courtois lui-même. Il y donne d’emblée ses propres réponses à une série de huit questions sur le communisme, qui en fait tournent très vite en autant d’affirmations traduisant, dès leur formulation, son approche. On imagine aisément ses réponses :
  • Un communisme ou des communismes ?
  • Pourquoi le communisme dans la Russie de 1917 ?
  • Le communisme : un bon idéal mal mis en œuvre ?
  • La terreur : fruit des circonstances ou de l’idéologie léniniste ?
  • Le Parti communiste français : un parti totalitaire ?
  • Communisme et nazisme : Peut-on les comparer ?
  • Quelle mémoire du communisme ?
  • Quelle histoire du communisme ?
Finalement il s’autorise cette réponse globale, qui résume bien l’orientation de l’entreprise : "Le communisme du XXe siécle a bien été un phénomène totalitaire étendu a tous les continents, qui perdure dans certains pays et qui a laissé de profondes cicatrices dans ceux où il avait imposé sa domination. La période postcommuniste ouverte en 1989-1991 s’étalera sans doute sur deux ou trois décennies, le temps que la décommunisation des structures et des esprits fasse son œuvre à travers le changement des générations. Et si l’"Idée" - celle d’une société égalitaire et prospère où l’individu ne serait plus aliéné - demeure vivace au cœur des hommes, ils devraient se souvenir qu’elle a débouché au XXe siècle sur une tragique illusion" (p.19). Nul doute qu’elle prédétermine fortement la conception et toute lecture de la suite.
- La deuxième, intitulée «  Temps forts  », rappelle les étapes chronologiques, depuis les origines du communisme (« L’éternel communisme »), jusqu’à « l’implosion de l’URSS en 1991 ». Après, plus rien. Curieux « éternel » qui s’arrête ainsi en 1991.
- En troisième partie figure le dictionnaire proprement dit : avec plus de 150 entrées consacrées soit aux grandes personnalités (Marx, Lénine, Trotski, Mao, Castro etc.), soit aux organisations (PCUS, PCF, Kominform, police politique), soit aux événements (Grand bond en avant, Grande terreur, Coup de Prague, Pacte germano-soviétique) et enfin à quelques dossiers consacrés à l’économie, à la société, à la vie culturelle, mais aussi à la face obscure du communisme (Laogai, Goulag, Khmers rouges, etc.), et à quelques aspects très restreints de l’actualité du communisme (néo-communisme, anticapitalisme...).
Dans son introduction S.Courtois explique que "le moment était venu de réunir un ensemble de spécialistes des diverses aires concernées par le communisme et de plusieurs disciplines - historiens, mais aussi politologues, sociologues, économistes et spécialistes pour établir une synthèse" (p.19). L’ouvrage comporte ici - comme en son temps le Livre noir - certaines contributions plus nuancées que l’introduction, parfois même de qualité, rédigées par une équipe d’une vingtaine de contributeurs, à la renommée et aux articles très inégaux, en consistance et en intérêt.
On ne retrouve pas dans ce dictionnaire l’obsession comptable débridée des « crimes du communisme », qu’on trouvait dans le Livre noir. Et si l’équipe des auteurs est plus large, on n’y retrouve plus Nicolas Werth qui après y avoir fourni un livre dans le livre - un bon tiers du Livre noir - sur l’Union soviétique, s’était publiquement désolidarisé de la longue introduction d’alors de S.Courtois. L’équipe apparemment élargie d’un vingtaine d’auteurs, en dehors de quelques spécialistes reconnus - tels Marc Lazar (articles PCF et PCI), Jean-Luc Domenach (tous les articles sur la Chine), ou Jacques Rupnik (sur les ex Démocraties populaires d’Europe de l’Est) - comporte une bonne moitié de chercheurs de l’équipe de S.Courtois et de la revue Communisme.
Ici, pour cet ouvrage de 640 pages, la bibliographie d’une page et demi seulement ne comporte que des ouvrages contemporains dans la stricte lignée du Livre noir et de ce dictionnaire. Mais sans aucune référence aux grands classiques du communisme, auxquels le lecteur pourrait souhaiter se reporter, afin de se former son propre jugement sur le contenu proposé.

S.Courtois, «  Dictionnaire du communisme  », 640 p., Larousse, octobre 2007, 28 €.

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