Êtes-vous prêts pour la fin du
monde ? Tou(te)s « survivalistes » !
Réchauffement climatique, pandémie mondiale, tsunami géant,
accident nucléaire, tremblements de terre, black out généralisé et même... invasion
zombie . « De l'état préoccupant de la planète au
déclin de la civilisation, en pesant sur notre santé ou notre
sécurité : les prévisions catastrophistes sont légion et
tendent à devenir des lieux communs » (p.15), des clichés
dans l'air du temps. Nous vivons dans le royaume de la peur, une
« peur exponentielle » qu'a décrite Benoît Rittaud. On
tente même désormais de lui donner un vernis théorique sous le nom
d'effondrement, ou, plus chic, de « collapsologie ». Ère
rêvée pour les 1% les plus riches et par tous les politiciens de
tous bords pour imposer, encore et encore, de nouveaux sacrifices
(taxes, augmentations, baisse du pouvoir d'achat, « plan
sociaux ») aux subalternes, ces « sans dents »
(Hollande), « ceux qui ne sont rien » (Macron)...
« Aujourd'hui, dans un monde où
la magie a plus ou moins disparue, la prévision officielle est
désormais l'apanage de divers « experts »
[« scientifiques », forcément] œuvrant avec plus ou
moins de rationalité et d'enthousiasme. Ce sont des futurologues et
lanceurs d'alerte en tous genres : économistes, écologistes,
traders, géo-politologues », bref, ceux qui hantent
chaque jour « C dans l'air » sur la Cinq.
Cependant, « dans cet univers a
priori dominé par la rationalité, la divination est loin d'avoir
disparue. Elle s'est nichée dans les interstices de la vie
quotidienne, sur internet, entre amis, dans les magazines, et les
survivalistes ne sont pas en reste dans cette évolution. Le
« Syndrome de Cassandre » - qui désignait pour Gaston
Bachelard la croyance prémonitoire – nous touche aujourd'hui de
plein fouet » (p.177).
Parce que les désastres annoncés sont
aussi nombreux que présentés comme inéluctables, certains s'y
préparent. Ils entassent des réserves de nourriture, construisent
des bunkers-abris, s'exercent à la survie en milieu sauvage et
collectionnent les armes. Dans la presse et les médias, du cinéma à
la téléréalité (Koh-Lanta et autres « robinsonnades
à la sauce sadique », comme « à l'état sauvage »
de Mike Horn), les industries culturelles s'emparent du
catastrophisme et du survivalisme, les propagent comme un virus dans
les esprits, tandis qu'une véritable économie internationale se met
en place.
Car, « si la pratique
survivaliste repose sur les outils du web [« tutos » sur
YouTube], elle s'enrichit en outre de « stocks de connaissances
disponibles », issus de sources variées. Ainsi les
survivalistes ne manquent jamais d'étayer leurs diagnostics funestes
à l'aide de rapports officiels alarmistes : ceux issus des
travaux du GIEC, du G20 ou du FMI [et de la Banque mondiale], entre
autres » (p.158).
Le moment est donc venu de mesurer et
de décrypter ce phénomène qui nous envahit au quotidien. Qui sont
les survivalistes? Quelles sont leur motivations ? Sont-ils des
individus lucides et prévoyants ou des nouveaux fanatiques,
prêcheurs de l’apocalypse ? Des Robinsons postmodernes ou des
paranoïaques va-t-en-guerre ? Bertrand Vidal, sociologue et
chercheur à l'université Paul Valéry de Montpellier analyse,
plaisamment mais très sérieusement, à l'aide d'exemples et
témoignages, ce fait de société très invasif qui ne connaît plus
ni frein ni frontières, de la Silicon Valley aux coins les plus
reculés de la planète. Alors, préparez-vous surtout aux pires
délires.
Bertrand Vidal, SURVIVALISME, êtes-vous
prêts pour la fin du monde ? Ed.ARKHÉ,
2018, 214 p.,18,90 €.
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