Dans Presse Océan de ce jour une
double page (2 et 3) sur la question « Loire Atlantique et
Nantes : la fusion ? ». Ce n'est pas vraiment un
"scoop" : la question de la fusion entre le
département de Loire Atlantique (son conseil général) et Nantes
(Nantes-Métropole ou le « pôle métropolitain »
Nantes-Saint-Nazaire) se pose depuis dix ans que la volonté de
regroupement de plusieurs niveaux du "mille-feuille" territorial et administratif est sans cesse relancée, de Sarkozy à
Macron, en passant par Hollande. Sous prétexte de cohérence et
d'économies, on a déjà vu ce que ça donnait pour les plus
(grandes) Régions ! La question n'est donc pas : « Quel
serait le périmètre du regroupement ? » [comme sur les cartes de PO ci-dessus], puisqu'il
semble clair qu'il s'agirait de dissoudre le département dans la
métropole, ou si l'on préfère, d'étendre la métropole à
l'échelle du département. Manière comme une autre d'en finir avec
la vieille dichotomie urbain/rural, ou de dépasser le clivage centre/périphérie.
Et de faire disparaître certaines portions métropolisées de la France périurbaine et rurale, déjà
considérée comme la "France d'en bas", comme chacun sait vouée définitivement à
l'invisibilité, à l'abstention ou au vote FN. Un triomphe surtout
pour la métropolisation à travers la fabrique de l'espace capitaliste néolibéral,
soumettant tout le territoire départemental non seulement à la zone
d'influence économique de l'agglomération centrale mais à sa
"gouvernance" éclairée, de plus en plus calquée sur
le modèle entrepreneurial, gestionnaire et technocratique, bien à la Macron.
Dans la pratique, cela pose de sérieux
problèmes de proximité et de non-démocratie. La fusion à
l'échelle des intercommunalités - comme celle en cours dans la douleur depuis le 1er
janvier 2017 entre Loire et Sillon et Cœur d'Estuaire - montre bien
les difficultés et les conséquences d'un tel exercice à une
échelle plus restreinte : redistribution des compétences,
recul de la proximité des services et des élus, des communes vidées
de leurs prérogatives, aux finances contraintes, pilotées par des
logiques de guichets (départemental, métropolitain, régional, national et même européen) les soumettant, par des critères d'éligibilité
stricts aux subventions et financements, auprès des divers échelons supérieurs.
Cette politique de fusions pluriscalaires n'est donc aucunement la
solution miracle aux problèmes territoriaux qui montent. Au-delà du
seul département, c'est aux communes elles-mêmes qu'il faut
d'urgence redonner vie, pour y ré-enraciner une démocratie décidemment perdue
de vue.
A vrai dire, la question n'est pas
neuve. Rappelons-nous :
« Dans une brève esquisse d'organisation nationale que la Commune [de Paris, en 1870] n'eut pas le temps de développer, il est dit expressément que la Commune devait être la forme politique même des plus petits hameaux de campagne. Les communes rurales de chaque département devaient administrer leurs affaires communes par une assemblée de délégués au chef-lieu de département. L'unité de la nation ne devait pas être brisée, mais au contraire organisée par la Constitution communale. Elle devait devenir une réalité par la destruction du pouvoir d’État qui prétendait être l'incarnation de cette unité, mais voulait être indépendant de la nation même, et supérieur à elle, alors qu'il n'en était qu'une excroissance parasitaire. Au lieu de décider une fois tous les trois ou six ans quel membre de la classe dirigeante devait « représenter » et fouler aux pieds le Peuple au Parlement, le suffrage universel devait servir au peuple constitué en communes. La Constitution communale aurait restitué au corps social toutes les forces jusqu'alors absorbées par l’État parasite qui se nourrit de la société et en paralyse le libre mouvement. Par ce seul fait, elle eut été le point de départ de la régénération de la France ».
C'est écrit en
1871 par Karl Marx*. Ce projet d'une Constitution communale reprend
chaque jour un peu plus d'actualité, dans les conditions nouvelles de notre
temps.
* Karl Marx, La guerre
civile en France, 1871.
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