L’ADDRN se penche sur les mystères du périurbain nazairien

Hier, 3 avril 2015, l’ADDRN (Agence pour le développement durable de la région nazairienne) présentait à Besné, au cours d'un séminaire "Viv(r)e les périurbains", réunissant une centaine d'élus et de cadres territoriaux, sa récente publication intitulée « Familles en campagne, la fabrique individuelle de l’étalement urbain, Enquête sociologique dans la région nazairienne », avec une préface du géographe Rodolphe Dodier, spécialiste du sujet.

Dans l’introduction, il est souligné que depuis son émergence, le périurbain reste une catégorie mal identifiée et considérée dans le débat public : « tantôt synonymes d’étalement urbain, tantôt valorisés comme retour à la campagne, les modes de vie périurbains suscitent des représentations sociales hétérogènes dominées toutefois par certaines stigmatisations : lieux refuges individualistes, espaces de relégation des ménages les plus vulnérables, responsables de l’artificialisation des sols, du mitage des espaces naturels et d’un surplus d’émission de gaz à effet de serre dus aux déplacements… »

Cette publication cherche à relativiser toutes ces visions unilatérales du périurbain. Elle le prend enfin en considération, sinon directement dans son titre, du moins dans son contenu. Les responsables de cette étude, Liza Martial-Kérivel et Pauline Rebours, ont présenté sa méthodologie et son contenu. Elle est ciblée sur un public particulier, selon le "prisme famille", car le poids des familles avec enfants dans l’ensemble des ménages est « un élément qui s’institue en marqueur périurbain » (p.22). Le nombre des familles enquêtées, sous la forme de questionnaires et d’entretiens, dans 9 communes sélectionnées, est de 767 sur un total de 1252, soit une proportion d’un peu moins d’un dixième du total des familles des communes concernées. Un échantillon sociologiquement représentatif certes, mais ce ciblage familles et communes restreint d’emblée la possibilité de mieux cerner la mixité socio-générationelle du périurbain, ainsi que les effets d’auréoles concentriques dans le périmètre.

Mais peu importe, l’objectif ciblé est atteint et cela produit de riches éléments de géographie vécue et sensible des familles autour de leur habitat. Avec des constats qui recoupent largement ceux du livre d'Anne Lambert, "Tous propriétaires ! L'envers du décor pavillonnaire" (Seuil, 2015) paru récemment (En cours de lecture, recension à venir). Avec d'emblée le même biais : c’est bien de cibler enfin le périurbain, pour combler les retards, mais il reste cependant réducteur de le restreindre au seul pavillonnaire. Autre manque remarquable : la publication, si elle évoque rapidement la question du vote, néglige totalement celle de la "gouvernance", intercommunale et métropolitaine, du périurbain. Conséquence vraisemblable du ciblage opéré et de la méthodologie adoptée, ce pourrait bien être là pourtant le chaînon manquant d'une approche du périurbain pouvant rendre compte de sa déréliction démocratique, échec de "l'interterritorialité", tant vantée, du géographe Martin Vanier. Certes est-il heureux que les géographes soient ainsi étroitement associés à la réflexion renouvelée sur le périurbain, encore faut-il que ce ne soit pas en sociologue ou en politiste, en oubliant, en quelque sorte, leur cœur de métier. 

Dans les chapitres suivants (2 - Choisir un chez soi ; 3 - L’importance du cadre de vie ; 4 - A propos des modes de vie…) la publication donne très largement la parole aux enquêtés. D'où un riche florilège d’appréciations diverses, qui construisent, touche par touche, une image nuancée du périurbain réellement vécu, ni rêve éveillée, ni cauchemar hébété. Mettant à jour de modestes réalités qui font pourtant, pour beaucoup, notre vécu quotidien, plus complexe qu'il n'y paraît parfois, lorsqu'il est vu de loin et de l'extérieur.



Une belle et utile publication, qui doit beaucoup à sa présentation, œuvre de la graphiste Barbara Caroff. A lire assurément, l’ADDRN ayant annoncé sa prochaine mise en ligne sur son site.

NB : Elle aborde succinctement la question, devenue cruciale, du vote (ou du non-vote : abstention, vote blanc) dans le périurbain, qui fut aussi l’objet d’une communication du géographe nantais Jean Rivière au cours du séminaire de Besné (« Y’a-t-il un vote périurbain ? », reprise de son article dans la Revue ESPRIT mars-avril 2013, dossier "Tous périurbains"). Nous y reviendrons très bientôt sur ce blog. Lire

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