Mise à jour : LECTURE : Notre-Dame-Des-Landes, ... priez pour nous ! A PROPOS D’UN LIVRE D’HERVÉ KEMPF (SEUIL, 2014) mercredi 23 avril 2014 par Jean-Yves Martin
http://www.jy-martin.fr/spip.php?article35
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Enquête. L’actuel aéroport de Nantes
(Loire-Atlantique) est saturé et vétuste. Situé en zone urbaine, son
développement est inenvisageable. Après enquêtes et débats publics, une
nouvelle structure aéroportuaire
devrait être mise
en exploitation
à l’horizon
2017
à Notre-Dame-
des-Landes.
Découvrir Nantes, c’est immanquablement en venir à lever les yeux au passage d’un géant du ciel, parfois en plein effort au décollage, survolant des zones habitées du centre-ville, la gare ou le Hangar à bananes (le nouveau lieu de vie nocturne des bords de Loire) à quelque 200 mètres d’altitude à peine. Débutée aux lendemains de la Première Guerre mondiale, l’histoire de l’aviation à Nantes a presque cent ans. Mais les Airbus et Boeing d’aujourd’hui n’ont plus rien à voir avec les avions à hélices qui fauchaient les marguerites. L’exploitation du terrain actuel de l’aéroport de Nantes-Atlantique, même s’il a été reconfiguré depuis, remonte aux années 1930. La zone était rurale. L’agglomération s’est étendue largement depuis. Certes, il n’y a jamais eu d’accident à déplorer. « Mais au prix de procédures de contournement très complexes, qui créent de la tension dans la tour de contrôle. Si on recalait la trajectoire, on survolerait tout Nantes », atteste Jean-Pierre Fromonteil, contrôleur aérien, en retraite depuis peu. Dans les années 1970, c’est en prévision du projet Concorde que le site de Notre-Dame-des-Landes, situé à trente minutes de Nantes et cinquante minutes de Rennes, a été préempté par l’État. Mais le projet a avorté. Les personnes concernées par les expropriations ont pu continuer à résider là et à cultiver des terres. Et puis, dans les années 1980, Nantes-Atlantique suffisait bien pour rallier Orly avec Air Inter. Une dizaine de vols par jour. Aujourd’hui, le TGV permet tout aussi bien et mieux encore de relier la capitale. Par contre, la demande s’exerce et ne cesse de s’accroître vers des villes françaises comme Marseille et Strasbourg. Vers des grandes villes européennes comme Milan, Amsterdam, Madrid, qui elles-mêmes desservent d’autres destinations mondiales. Les aéroports parisiens sont saturés et plus personne ne peut songer à la construction d’un troisième aéroport en Île-de-France. Reste que l’aéroport de Nantes atteint lui aussi le niveau de saturation. L’État a réactivé le projet de construction d’un aéroport à Notre-Dame-des-Landes, avec deux pistes et non plus une seule, pour éviter une « exploitation tendue et lourde en contrainte », se félicite notre aiguilleur du ciel. Mais « il ne s’agit plus de parler de projet », pour Jacques Auxiette, président du conseil régional des Pays de la Loire et du syndicat mixte aéroportuaire qui regroupe désormais 28 collectivités locales et regroupements de collectivités, « car nous sommes entrés dans la phase de réalisation ».
L’équipement, déclaré d’intérêt public en 2008, sera
construit et exploité par le groupe Vinci. Une délégation de service public,
concédée par l’État pour une durée de cinquante-cinq ans. Officialisé fin 2010,
ce partenariat public-privé a une particularité : il inclut une cause de retour
« à meilleure fortune ». L’aéroport doit coûter 581 millions d’euros. Vinci en
amène 311, l’État 125,5 et six collectivités (régions Pays de la Loire,
Bretagne, conseil général de Loire-Atlantique, Nantes Métropole, Cap Atlantique
et Communauté d’agglomération de la région nazairienne et de l’estuaire)
apportent 115 millions d’euros. « Avec la clause, il ne s’agit pas de
subventions, mais d’avances remboursables », explique Jacques Auxiette. « Les
hypothèses d’attractivité permettant d’espérer des excédents d’exploitation,
nous avons considéré que l’entreprise privée Vinci, qui n’est pas la seule à
investir, ne devait pas être la seule à en bénéficier », poursuit l’élu
socialiste.
En Loire-Atlantique, le PS, le PCF, le MRC, le Parti radical
de gauche ainsi que l’Union démocratique bretonne soutiennent le transfert vers
Notre-Dame-des-Landes, qui est qualifié d’« indispensable » du point de vue du
développement du territoire et de l’emploi, tout en arguant qu’un équipement
aéroportuaire ne signifie pas bétonnage. Même, « il garantit la préservation de
près de 300 hectares d’espaces naturels et agricoles autour de la plate-forme
limitant ainsi l’étalement urbain », soulignent ces partis. Répondant aux
normes BBC, il sera autosuffisant en énergie. Le PG, qui parle d’un projet
« ruineux », « inutile et néfaste », et EELV considèrent, pour leur part, que
le débat n’est pas clos, malgré les milliers d’heures de débats et d’enquêtes
publiques. Ainsi, le député (EELV) François de Rugy, s’il ne nie pas que « des
étapes indéniables ont été franchies », rappelle que des études doivent encore
être menées, notamment dans le cadre de la loi sur l’eau. Études géologiques,
prise en compte d’éventuelles zones humides à reconstituer… « Au-delà des
aspects juridiques, ces questions, même si elles font figure de grain de sable,
sont désormais posées. Peut-être que tout ira bien, mais peut-être que les
délais et le coût vont s’en trouver réévalués à la hausse. » De quoi dissuader
Vinci ? De quoi inciter l’entrepreneur privé à exiger des rallonges budgétaires
que l’État et les collectivités ne seraient pas en mesure de mettre sur la
table ? Autant d’hypothèses qui n’alarment pas l’élu écologiste : « Si le
projet venait à être abandonné ou repoussé, avec l’actuel site de
Nantes-Atlantique, la région ne serait pas dépourvue d’aéroport. » « Pas les
moyens », c’est également l’argument avancé par le député des Verts quand est
abordée la desserte ferroviaire de l’aéroport. Une ligne TGV entre Nantes et
Rennes, via Notre-Dame-des-Landes, ainsi qu’un tram-train entre Nantes et le
futur aéroport, tel est le combat que les élus régionaux PS et PCF mènent. Pour
eux, comment parler d’un équipement de développement durable si la voiture
reste le seul moyen d’y accéder ?
Autant de débats que François de Rugy souhaite voir mener « démocratiquement ». Des différences de positionnement à gauche « que chacune des organisations assume et qui n’empêchent pas de travailler ensemble, en particulier au sein du Front de gauche », commente Aymeric Seassau, secrétaire de la fédération PCF de Loire-Atlantique. « Dans ce genre de sujet, le débat politique approfondi et instruit, mené dans un esprit de dialogue, doit l’emporter sur les passions », estime pour sa part Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, qui juge ce transfert « utile au regard des problèmes de sécurité et de nuisances occasionnés par l’enclavement de l’actuel aéroport, utile au développement de l’emploi », dans la filière aéronautique. Car, paradoxe de taille : Airbus, travaillant à des appareils adaptés aux défis écologiques d’aujourd’hui et de demain, construit des A380 qui ne peuvent pas atterrir à Nantes. La piste ne fait que 40 mètres de large, il leur en faut 60. Mais l’opposition se cristallise notamment autour des questions d’expropriation d’habitations et de terres agricoles. Pour se faire entendre, les opposants au projet de transfert ont constitué des associations qui créent régulièrement l’événement, quitte à en venir aux mains. On se souvient aussi de la caravane du PS sillonnant la France dans le cadre de la primaire, qui fut saccagée en août 2011… Jacques Auxiette fait le point de la situation : « Sur trente-neuf dossiers concernés, vingt-sept sont réglés avec protocole d’accord signé, et il reste cinq dossiers entre les mains du juge des expropriations, comme cela se fait dans de nombreux projets d’aménagement. » C’est dans ce contexte que se revit ce qu’il est coutume d’appeler à Nantes « un nouveau Larzac » ; des groupes de jeunes, venus parfois de très loin, n’hésitant pas à squatter des logements désormais vides.
Autant de débats que François de Rugy souhaite voir mener « démocratiquement ». Des différences de positionnement à gauche « que chacune des organisations assume et qui n’empêchent pas de travailler ensemble, en particulier au sein du Front de gauche », commente Aymeric Seassau, secrétaire de la fédération PCF de Loire-Atlantique. « Dans ce genre de sujet, le débat politique approfondi et instruit, mené dans un esprit de dialogue, doit l’emporter sur les passions », estime pour sa part Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, qui juge ce transfert « utile au regard des problèmes de sécurité et de nuisances occasionnés par l’enclavement de l’actuel aéroport, utile au développement de l’emploi », dans la filière aéronautique. Car, paradoxe de taille : Airbus, travaillant à des appareils adaptés aux défis écologiques d’aujourd’hui et de demain, construit des A380 qui ne peuvent pas atterrir à Nantes. La piste ne fait que 40 mètres de large, il leur en faut 60. Mais l’opposition se cristallise notamment autour des questions d’expropriation d’habitations et de terres agricoles. Pour se faire entendre, les opposants au projet de transfert ont constitué des associations qui créent régulièrement l’événement, quitte à en venir aux mains. On se souvient aussi de la caravane du PS sillonnant la France dans le cadre de la primaire, qui fut saccagée en août 2011… Jacques Auxiette fait le point de la situation : « Sur trente-neuf dossiers concernés, vingt-sept sont réglés avec protocole d’accord signé, et il reste cinq dossiers entre les mains du juge des expropriations, comme cela se fait dans de nombreux projets d’aménagement. » C’est dans ce contexte que se revit ce qu’il est coutume d’appeler à Nantes « un nouveau Larzac » ; des groupes de jeunes, venus parfois de très loin, n’hésitant pas à squatter des logements désormais vides.
L’Association citoyenne intercommunale des populations
concernées par le projet d’aéroport (Acipa), ainsi qu’une quarantaine d’autres,
constituées en coordination, appelaient à une manifestation à Nantes le
24 mars. Elle a réuni de 4000 à 10 000 personnes (selon les sources).
« Les médias relaient beaucoup les propos des personnes qui
sont contre l’aéroport. (...) On parle beaucoup moins de ce qu’il est
susceptible d’apporter à la région en termes de création d’activités et
d’attractivité. Il faudrait peut-être se mobiliser pour dire qu’on est pour
l’aéroport et qu’il constitue un intérêt économique fort pour la région »,
déclarait, il y a quelques semaines, Jean-Charles Cadiou, vice-président de
l’université de Nantes en charge des relations avec les entreprises. Côté
emplois, notons que le futur chantier emploiera 3 000 personnes. La piste
de l’aéroport actuel, Nantes-Atlantique, pourra être utile à Airbus, dont un
site de fabrication est à proximité, pour des essais. La filière aéronautique
représentant quelque 20 000 emplois dans la région.
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