"Recul et avenir du PCF"


Un essai nourri d’entretiens approfondis avec des communistes

Ce livre d’essai et d’entretiens, est publié aux Éditions du Temps des Cerises, avec le concours de la Fondation Gabriel Péri. Entre 2005 et 2007, 37 militant(e)s, avec divers niveaux d’implication et de responsabilités, « se sont livrées avec beaucoup d’honnêteté et de conviction à l’exercice difficile de l’entretien ».  Soulignant que « l’histoire du PCF a été le fait de militants demeurés fidèles à ce parti et de militants, nombreux, qui l’ont quitté »,  l’utilisation du terme de "diaspora" paraît  à l’auteur de nature à rendre compte de cet état de fait. Mais une "diaspora" étant une « dispersion […] à travers le monde » [Robert], le PCF serait-il donc devenu à ce point étranger dans son propre pays ?
La restitution organisée et commentée de ces entretiens, enregistrés et largement retranscrits, fournit, il est vrai, « un aperçu très riche des représentations de la diaspora sur les raisons du recul du PCF, les mutations engagées, ses chances de succès et, au-delà, sur les perspectives d’un nouvel horizon politique dépassant le capitalisme, le rôle que pourrait y jouer le PCF ».
Selon les regroupements opérés dans le livre, quatre grands thèmes se conjuguent, s’entrecroisent, interagissent pour expliquer le recul du PCF : l’attachement maintenu à l’Union soviétique et, pendant longtemps, à son modèle de socialisme « qui paralyse l’émergence d’une réflexion propre » ; la conception du parti et son mode d’organisation « qui pèsent sur la circulation des idées » ; la stratégie politique d’union de la gauche « qui se retourne contre son principal promoteur » ; et le « décalage progressif qui se creuse avec l’évolution de la société française ».
Chacun de ces quatre grands thèmes fait l’objet d’une partie distincte de l’ouvrage s’articulant en deux chapitres. Le premier resitue le contexte : il retrace à grands traits l’évolution de la société française, celle de la vie politique, la spécificité de l’organisation politique qu’a constitué le PCF, les principales étapes de la construction de la société socialiste en URSS et les problèmes rencontrés. Chaque fois, les prises de position officielles du PCF – tirées des documents de congrès – viennent compléter ces rappels contextuels.
Une plongée profonde qui fait la part belle aux larges citations des entretiens, dont l’anonymat des interviewé(e)s est un secret de polichinelle : quand il s’agit d’une « Employée puis permanente, PCF, secrétaire nationale, ex-Ministre, députée », dont les initiales sont M.G.-B., ou encore de J.Ra. « journaliste (retraité), ex-comité-central, ex-Ministre, ex-député-sénateur »,  tout le monde voit immédiatement de qui il peut s’agir.
Au total, ce livre traite bien davantage du "recul du PCF" que de son "avenir". Compte tenu de la date des entretiens, cet avenir y est davantage évoqué par la référence à l’altermondialisme que par celle à un Front de Gauche encore dans les limbes. Ainsi l’auteur, dans sa conclusion, estime-t-il que  « le champ des alternatives et des recompositions "à la gauche de la gauche" reste largement ouvert dans un contexte nouveau marqué à la fois par une crise financière et économique majeure et par les limites des réponses social-démocrates. Et si, hier, c’est une articulation particulière d’événements, d’évolutions, de prises de positions, de réponses organisationnelles qui a produit le recul du PCF comment préjuger pour demain des contours des forces politiques qui émergeront de nouvelles configurations économiques et sociales ». Le sort du PCF serait-il donc scellé, son "avenir" n’étant plus que celui d’une disparition annoncée ?


B.Tabuteau, "Recul et avenir du PCF, la diaspora communiste s’exprime", 2011, 421 pages, 24 €.

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