"Actualité, savoir se taire"

par Bernard Lahire*, sur le site de Regards 11 juillet 2011

"La construction médiatique de la réalité a fini par imposer dans l’ensemble de la société un sens de ce qui est « actuel », « important » et « digne d’intérêt ». L’attention médiatique, qui se concentre sur une série d’événements ou de phénomènes, tend fatalement à en laisser d’autres dans l’ombre. On mesure alors le pouvoir de tous ceux qui, d’une manière directe ou indirecte, contribuent à « faire l’actualité », à la « définir » et, au bout du compte, à établir ce qui est largement considéré comme la réalité du moment.
Le système de définition politico-médiatique de la réalité fait apparaître toutefois ses limites de crédibilité à chaque fois qu’un thème d’actualité rabâché obsessionnellement durant plusieurs jours, voire plusieurs semaines, laisse brutalement place à un autre fait jugé temporairement plus urgent. Les gouvernants, qui ont bien compris le profit qu’ils pouvaient tirer d’un tel système, s’efforcent de censurer indirectement et subtilement certains sujets en concentrant l’attention sur d’autres sujets qui font diversion. Une partie de la force des grands médias et de l’Etat réside ainsi dans la possibilité d’orienter la réflexion publique, de faire parler ou d’obliger à débattre sur des sujets imposés."
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* Bernard Lahire est professeur de sociologie à l’ENS de Lyon et directeur du Groupe de recherche sur la socialisation au CNRS.
Ses travaux récents portent sur les conditions de vie et de création des écrivains. Il a publié Franz Kafka. Eléments pour une théorie de la création littéraire, (éd. La Découverte, 2010).

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