Pour une ville solidaire : "Ralentir la vi(ll)e" !

Les deux coauteurs-organisateurs, Paul Ariès directeur du journal Sarkophage et Bernard Genin, maire PCF de Vaulx-en-Velin, entourés ici d’élus et de spécialistes des enjeux urbains et des militants (Sloow Food, Villes lentes, Emmaus, etc.),  prennent en compte le discours sur les catastrophes environnementales qui menacent, épuisement des ressources et réchauffement climatique. Mais ils font aussitôt cet autre constat terrible : la ville moderne, globale et compétitive tend à exclure toujours un peu plus les plus pauvres. Or, la cité ne saurait être réduite à sa seule fonction de compétitivité économique. Pour eux : « Notre bonheur et notre qualité de vie passent par d’autres manières de penser et d’agir ».
Leur interrogation Ralentir la vi(ll)e ?  n’est donc pas seulement une question de qualité de la vie, mais aussi de justice sociale et de démocratie politique. Est-ce qu’une ville solidaire, une ville écologique, une ville démocratique ne peut-être qu’une ville ralentie ? Le ralentissement est-il nécessaire pour rendre la ville aux plus pauvres, aux plus faibles, "pour une ville solidaire" ?

Au moment où pullulent les fausses solutions du "capitalisme vert" ( telles la taxe carbone, ou la foi béate dans la technoscience), les citoyens, les militants, les experts, les élus doivent débattre de la meilleure façon de satisfaire avant tout les besoins fondamentaux du plus grand nombre. Face aux mots poisons du pouvoir (le "toujours plus" : plus vite, plus haut, plus cher, plus moderne), nous devons inventer nos propres mots chantiers, nos propres champs du possible : la relocalisation, la gratuité, la coopération, le prendre soin, la ralentissement, la proximité. A une échelle humaine maîtrisée par les habitants : proximité, simplicité, convivialité.
Contre les fausses solutions du "capitalisme vert" et du discours du "développement durable" qui n’en est que le "cache-sexe",  ce petit livre explore cette piste politique fondamentale : la nécessité de ralentir la ville afin de la rendre aux milieux populaires. Une société partagée ne peut qu'être une société lente.
Mais comment organiser cette lenteur ? Comment la rendre désirable ? Pour répondre, les auteurs pointent trois objectifs, qui constituent autant de défis :
  • Premier défi : apprendre à parler d'écologie aux populations les plus pauvres (les chômeurs, les Smicards, les "sans" papier, domicile, etc.).
  • Deuxième défi : refuser d'en faire une affaire de bobos avec des pseudos solutions technoscientistes qui promettent des maisons écolos à 4 000 euros le mètre carré.
  • Troisième défi : inventer une alternative qui ne fasse pas payer la crise environnementale aux plus pauvres, comme ils paient déjà implacablement les crises financière, économiques et sociale.
Avec un écueil de taille : la (non-)maîtrise du foncier : « il empêche le droit au logement pour tous dans les cœurs de ville, repousse les plus démunis dans des ghettos ou des périphéries de plus en plus lointaines. Et comme à l’accoutumée dans ce système ultralibéral , la "bien-pensance" les montre d’un doigt accusateur : en plus d’être pauvres, ces marginaux polluent la planète avec leur vieille voiture et leur copropriété dégradée » !
Ce colloque et le livre qui en est issu, sont ainsi l’occasion de rappeler qu’"être humaniste et républicain, ce devrait être toujours de choisir les grandes causes des plus démunis". Et de souligner que "la ville durable est la ville pour tous" : « une ville dense, économe en énergie et qui privilégie des transports collectifs ».
Pour  Bernard Genin, en définitive : « il s’agit de savoir dans quelle société nous voulons vivre. Une société d’interdictions si nous continuons à consommer toujours plus dans un monde fini ? Une société où les plus pauvres seront sacrifiés pour permettre aux privilégiés de continuer de vivre selon leurs modes de vie actuels ? ... Ou une société démocratique,  plus juste et plus urbaine ? »
Coll. "Ralentir la ville… pour une ville solidaire", Ed. Golias, Lyon, 2010,12 €

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